Quatrième de couverture
9
juin 1865. Charles Dickens, alors âgé de 53 ans et au faîte de son art et de sa
gloire, regagne Londres en secret en compagnie de sa maîtresse à bord du train
de marée. Soudain, à Staplehurst, l'Express déraille. Tous les wagons de
première classe s'écrasent en contrebas du pont, à l'exception de celui de
Dickens. Indemne, "l'écrivain le plus célèbre du monde", comme on le
surnomme, tente de se porter au secours des survivants. Au fond du ravin, sa
route croise celle d'un personnage à l'allure spectrale qui va désormais
l'obséder : Drood. De retour à Londres, Dickens confie le secret de son étrange
rencontre à son ami Wilkie Collins, écrivain lui aussi, à qui il reviendra de
relater les dernières années de la vie de celui qu'il appelle, avec autant
d'admiration que d'ironie, l'Inimitable. A la poursuite de Dickens, qui a cessé
d'écrire pour hanter les bas-fonds - cryptes, cimetières et catacombes - de
Londres, Collins cherche à comprendre quels rapports unissent désormais
l'Inimitable et l'inquiétant Drood. Mais peut-on vraiment porter foi au récit
halluciné de Collins, opiomane en proie à la paranoïa ? Inspiré par Le Mystère
d'Edwin Drood, le roman mythique que Dickens laissa inachevé à sa mort en 1870
- cinq ans jour pour jour après son accident de train -, Drood nous entraîne
dans le Londres interlope de Jack l'Eventreur et des sciences occultes.
Dan
Simmons prend le risque de dérouter son lectorat tant ce récit se singularise
de ses autres romans : faisant souvent la part belle au fantastique, à
l’horreur et au polar, l’auteur semble bien suivre cette direction coutumière
dans les cent cinquante premières pages du roman mais ce n’est que pour mieux
ensuite relâcher l’intrigue afin de plonger tête la première dans le roman
psychologique pur jus. Biographie romancée des cinq dernières années de
la vie de Charles Dickens à travers le regard embrumé de l’opiomane Wilkie
Collins, qui surnomme son mentor non sans humour teinté de sarcasme
l’Inimitable, c’est avec étonnement que nous suivons les relations ambigües de
ces deux hommes tour à tour jaloux, envieux, admiratifs, aimants, haineux ou
manipulateurs.
La
surprise fut de taille en ce qui me concerne, ne m’attendant pas du tout à
cette tournure au cours du récit. Il n’empêche que la balade fut intéressante,
tant Dan Simmons reste tout de même Dan Simmons : horreur des bas-fonds
londoniens, prisme déformant de la réalité à travers les yeux du narrateur
(Wilkie Collins) drogué au laudanum, folies hallucinatoires, autodestructions
et aliénations diverses, manipulations mentales et pouvoir de suggestion. Et
même si on sent que l’auteur s'est énormément documenté sur cette époque, il
arrive à donner à ces personnages une telle épaisseur qu’on a l’impression à la
fin du roman de les avoir réellement côtoyés.
Drood
n’évite malheureusement pas certaines longueurs dues à de multiples détails et
répétitions qui alourdissent le récit.
Les
amateurs de C. Dickens et de W. Collins se délecteront à coup sûr, les autres
peut-être aussi, sachant qu’il s’agit avant tout d’un roman plus psychologique
que terrifique. Un roman qui prend du temps et qui prend son temps, mais j’y ai
trouvé mon compte au final, même si l’auteur m’a prise au dépourvu tant je
m’attendais initialement à autre chose. Avec cette impression d’avoir
finalement été manipulée à mon tour, mais non sans consentement tacite ;-)
A
noter qu’il ne faut pas avoir lu les romans de C. Dickens et de W. Collins pour
suivre la trame du récit : on loupe certainement quelques références et mises
en correspondance sans pour autant que cela nuise à la compréhension de
l’ensemble du roman.
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