mardi 13 novembre 2012

Paperboy de Lee Daniels

Synopsis :

1969, Lately, Floride. Ward Jansen, reporter au Miami Times, revient dans sa ville natale, accompagné de son partenaire d’écriture Yardley Acheman. Venus à la demande de Charlotte, femme énigmatique qui entretient une correspondance avec des détenus dans le couloir de la mort, ils vont enquêter sur le cas Hillary Van Wetter, un chasseur d’alligators qui risque d’être exécuté sans preuves concluantes. Persuadés de tenir l’article qui relancera leur carrière, ils sillonnent la région, conduits par Jack Jansen, le jeune frère de Ward, livreur du journal local à ses heures perdues. Fasciné par la troublante Charlotte, Jack les emmène de la prison de Moat County jusqu’aux marais, où les secrets se font de plus en plus lourds. L’enquête avance au coeur de cette Floride moite et écrasante, et révèle que parfois, la poursuite de la vérité peut être source de bien des maux... 

Il y avait matière à faire un bon film : la chaleur suintante et étouffante de la Floride et des marécages, les pulsions troubles et animales des personnages, le racisme larvé, la femme fatale et le jeune oisillon fou amoureux de la belle. Un film aux allures de parcours initiatique et de thriller qui ne choisit jamais vraiment son camp mais qui se révèle surtout vulgaire et indigeste à certains moments. Trop caricatural, trop racoleur, comme si le réalisateur prenait son malin plaisir à vouloir choquer son public en faisant le plus trash possible. Une histoire pourtant qui avait du potentiel mais qui aurait mérité un autre réalisateur. Mention spéciale pour John Cusack qui est franchement très convainquant dans un rôle totalement inhabituel de « méchant » : je l’ai trouvé absolument effrayant ! 


Titre original : The Paperboy
Réalisateu r: Lee Daniels
Acteur s: Matthew McConaughey, Zac Efron, John Cusack, Nicole Kidman, David Oyelowo
Origine : États-Unis
Genres: Drame Thriller
Année de production : 2012
Date de sortie en Belgique : 17/10/2012
Durée : 1h47

Note : 3/5

Les Hauts de Hurlevent d'Andréa Arnold

Synopsis 

Angleterre – XIXème siècle. Heathcliff, un enfant vagabond, est recueilli par M. Earnshaw qui vit seul avec ses deux enfants, Hindley et Cathy, dans une ferme isolée. Heathcliff est bientôt confronté aux violences de Hindley, jaloux de l’attention de son père pour cet étranger. Le jeune garçon devient le protégé de Cathy. A la mort de M. Earnshaw, Cathy est courtisée par le fils de riches voisins, laissant peu à peu Heathcliff à la merci de Hindley. A l’annonce du prochain mariage de Cathy, Heathcliff s’enfuit. L’attachement fraternel qu’il vouait à Cathy se transforme alors en un amour obsessionnel. Le film est présenté en compétition lors de la 68è Mostra de Venise. 

J'ai aimé la façon dont la réalisatrice a pris à bras le corps le roman d'Emily Brontë : tout est dans le ressenti, l’instinctif, le non-dit. Le langage des corps, la force de la nature, la sauvagerie et l’animalité des sentiments au détriment des dialogues, nous sommes bien loin d’une adaptation académique. Une adaptation qui va certainement en dérouter plus d’un et qui ne s’apprivoise pas si facilement : je n’ai plus compté le nombre de bâillements « à s’en décrocher la mâchoire » de la personne assise non loin de moi. J’ai pour ma part beaucoup apprécié ce contact avec les éléments de la nature, ce vent, cette lande, il y a du Terrence Malick dans ces plans-là, comme ce parallélisme entre la nature sauvage et la férocité des sentiments, ça claque, ça cogne, tout est dans la brutalité des relations à travers le corps et le regard des personnages. Une adaptation naturaliste puissante mais pointue aussi, pas vraiment grand public. 




Titre original : Wuthering Heights
Réalisateur : Andrea Arnold
Acteurs : Kaya Scodelario, James Howson, Nichola Burley, Oliver Milburn, Steve Evets, Amy Wren
Origine : Royaume-Uni
Genres : Drame Romance
Année de production : 2011
Date de sortie en Belgique : 02/05/2012
Durée : 2h08

Note : 4/5

lundi 12 novembre 2012

A Royal Affair de Nikolaj Arcel (film)

Synopsis
 
Le 18ième siècle. L'histoire vraie d'un homme ordinaire qui gagne le coeur d'une reine et démarre une révolution. Centré sur le triangle amoureux constitué par Christian VII, roi cyclothymique et débauché, l'idéaliste Struensee, médecin imprégné de la pensée des Lumières, et la jeune reine Caroline Mathilde, A Royal Affair relate l'épopée d'idéalistes audacieux qui, vingt ans avant la révolution française, risquèrent tout pour imposer des mesures en faveur du peuple.
 
Excellent film historique que je ne peux que vous conseiller tant tout est absolument maîtrisé : le jeu des acteurs (l’excellent Mads Mikkelsen dans le rôle de Johann Friedrich Struensee, l’émouvante Alicia Vikander dans le rôle de la reine Caroline Mathilde de Hanovre et l’épatant Mikkel Boe Folsgaard dans le rôle du roi foldingue Christian VII du Danemark), la reconstitution historique, les enjeux politiques de l’époque, la misère du peuple et le nid de vipères du pouvoir en place, sans oublier la folle passion de Johann Friedrich Struensee pour la reine. De l’intrigue et des complots, l’influence des idées du Siècle des lumières, l’idéalisme au service de la révolution, une histoire d’amour intense et romantique, des personnages fouillés et intéressants, s’il ne faut voir qu’un film historique cette année, c’est celui-là ! Et un final renversant et dramatique à souhait, car s’il s’agit bien d’un film historique, le drame est irrémédiablement de la partie. Un régal.





 
Prix du public de l'American Film Institute.
Double Ours d'Argent (celui du meilleur scénario et celui du meilleur acteur) au Festival de Berlin.

Et pour ceux ou celles qui aimeraient en savoir plus sur cette période très riche de l’histoire du Danemark, je vous conseille le roman Le médecin personnel du roi de Per-Olov Enquist.

Moins réussi que son pendant au cinéma, il fournit néanmoins des éclairages supplémentaires très intéressants et extrêmement bien documentés sur le sujet. Dommage que la plume de l’auteur ne soit pas plus légère, restant plus proche de la biographie que du roman.

dimanche 11 novembre 2012

Tango libre de Frédéric Fonteyne

Tango libre de Frédéric Fonteyne 
France, Belgique, Luxembourg - 2012
Avec François Damiens, Anne Paulicevich, Sergi López, Jan Hammenecker, Zacharie Chasseriaud

JC (François Damiens), gardien de prison, est un homme sans histoires. Sa seule fantaisie, le tango, une fois par semaine. Un soir de cours il danse avec une nouvelle, Alice (Anne Paulicevich), la trentaine radieuse, mère d'un ado de 15 ans. Le lendemain, il revoit cette femme au parloir de la prison. Elle rend visite à deux prisonniers, Fernand (Sergi Lopez) et Dominic (Jan Hammenecker), deux vieux complices de toujours. L'un est son mari, l'autre son amant. JC, l'homme sans histoires, se retrouve spectateur d'une femme avec trop d'histoires. Une femme qui vit au gré de ses envies et selon ses propres règles, partagée entre ses hommes. Le règlement de la prison interdit aux gardiens de côtoyer la famille des prisonniers... JC va transgresser tous les principes qui définissaient sa vie.
 
Le réalisateur belge Frédéric Fonteyne (Une liaison pornographique, La Femme de Gilles) revient, après plusieurs années d’absence, en reprenant un thème qui lui est cher, à savoir l’amour et ses chemins de traverse. Un film que j’ai aimé pour le souffle de liberté qu’il dégage : liberté d’aimer différemment, liberté de danser le tango pour se sentir exister.
 
Un film qui oscille souvent entre le sourire et les larmes, entre la grâce et la sensualité d’une femme qui s’abandonne aux corps lourds et maladroits de ses amoureux qui se mettent à danser le tango pour séduire la belle. On ne peut s’empêcher de se dire que quatre hommes, en comptant le fils en plein crise d’adolescence (Zacharie Chasseriaud, un jeune acteur qu’on reverra à coup sûr), est sans doute très ambitieux pour une seule femme mais qu’importe, on se laisse porter par la fable, par ces corps filmés au plus près, par cette violence des mots et des gestes, par l’intensité des sentiments. Sans oublier la beauté de la danse lorsque deux détenus argentins se jettent à corps (à cœur ?) perdu dans un tango, tout en sueur et en force, au milieu des codétenus. Quelle intensité et quelle énergie se dégagent de cette scène !
 
De bons comédiens, quelques beaux moments et un final assez burlesque il est vrai mais qui a le mérite de nous donner le sourire. A défaut d’un grand film, un film sympathique, on ne va tout de même pas bouder son plaisir, que diable ! 




jeudi 8 novembre 2012

Le sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferrari

Quatrième de couverture
 
Empire dérisoire que se sont constitué ceux qui l’ont toujours habité comme ceux qui sont revenus y vivre, un petit village corse se voit ébranlé par les prémices de sa chute à travers quelques personnages qui, au prix de l’aveuglement ou de la corruption de leur âme, ont, dans l’oubli de leur finitude, tout sacrifié à la tyrannique tentation du réel sous toutes ses formes, et qui, assujettis aux appétits de leur corps ou à leurs rêves indigents de bonheur ou d’héroïsme, souffrent, ou meurent, de vouloir croire qu’il n’est qu’un seul monde possible.
 
 
Un roman aux accents philosophiques sympathiques qui se veut sans nul doute ambitieux mais qui ne s’élève jamais véritablement, se lisant sans déplaisir mais sans passion non plus, restant souvent à la surface des personnages et des événements. Avec la sensation qu’il ne va plus m’en rester grand-chose dans les quelques mois à venir, si ce n’est une certaine propension au fatalisme et au délitement. Un prix Goncourt un peu surprenant en ce qui me concerne, trouvant le roman assez moyen sans être mauvais pour autant. Je vais toutefois tenter de lire un autre roman du même auteur, histoire de confirmer ou non cette première impression mitigée.
 
Remarque en passant : ne vous fiez pas à la quatrième de couverture particulièrement pédante à mon goût. 


mercredi 7 novembre 2012

Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka

Julie Otsuka rend un très bel hommage à toutes ces femmes japonaises qui, en cette année 1919, quittent l’Empire du Soleil Levant à bord d’un bateau pour rejoindre leurs futurs époux travaillant aux Etats-Unis. Des hommes qu’elles connaissent à peine, tout au plus par l’entremise d’une photo datée ou d’une lettre écrite par l’intermédiaire d’un tiers. L’éprouvante traversée de l'océan Pacifique n’est que la première étape d’un périple qui s’annonce redoutable et épuisant. L’emploi du « nous » narratif et l’apparente sobriété du style donnent au récit une belle puissance d’évocation du destin de toutes ces femmes, qui seront confrontées tour à tour à la douleur de l’exil, au racisme, à l’ostracisme et enfin à l’exclusion au nom d’une guerre dont elles ne connaissent tout au plus que le nom. Un beau témoignage et un travail de mémoire pour ne pas oublier la souffrance de ces femmes anonymes qui, à force de sacrifice, de travail acharné, de douleurs et de souffrances sont allées au bout de leur rêves souvent avortés au bord du chemin. Un prix Femina 2012 du roman étranger amplement mérité.
 
Ce roman a été lu dans le cadre de l’opération Masse Critique du site Babelio. 


La fille des Louganis de Metin Arditi

J’ai beaucoup aimé La fille des Louganis, bien mieux que Le turquetto du même auteur, que je trouvais trop distancié. Une histoire qui prend des allures de tragédie grecque mais qui, insensiblement, finit par émouvoir malgré la multitude et la gravité des sujets abordés : la passion, l’adultère, l’inceste, l’homosexualité, le suicide, la culpabilité, mais aussi quelques belles pages sur l’amitié et la compassion. Un sujet casse gueule sur le destin et les secrets de famille, qui a réussi à m’emporter, l’auteur arrivant à ne pas emmêler les fils de l’histoire en construisant une belle trame sombre, complexe et émouvante à la fois.
 
« Elle esquissa un sourire. Frère ou amant, oncle ou père, tante ou belle-mère. Tout se mélangeait. À tous la vie avait été dure. Elle les avait fait plier. Pavlina pensa aux mots du père Kosmas. Il y en avait, des reflets d'amour dans les péchés des Louganis. Des reflets profonds et magnifiques.
 
- Il reste le souvenir...
- Moi aussi, j'ai ce même souvenir, Pavlina. Personne ne peut me l'enlever. Il est à moi pour toujours. »