mercredi 14 mai 2008

Les envoûtés de Witold Gombrowicz

Quatrième de couverture
 
Il règne autour des murailles du sinistre château de Myslocz une atmosphère bien étrange. On raconte alentours qu’un trésor y serait enfoui, que certaine pièces seraient hantées, que le Prince, maître des lieux, serait frappé par la folie.  Une « faune » singulière gravite autour de ce lieu maudit et maléfique : une jeune héroïne fatale, son double masculin qui attire le mal comme un aimant, un savant trop naïf, un secrétaire sans scrupule et un étrange mage…
Tous ces pions sont en place, certains sont littéralement possédés par d’autres, ou par le mal dans sa plus pure essence.  Ils vont d’observer, se tromper, se haïr ou même s’aimer dans un climat d’angoisse et d’épouvante.  Quel est donc le terrible secret qui peuple les corridors de Myslocz ?
 
Entre deux lectures intéressantes mais pas des plus rigolotes ( « Reflets dans un œil d’or » de Carson McCullers et « Le retour » d’Anna Enquist ), j’avais envie d’alterner avec quelque chose de plus léger et mon choix s’est posé sur le roman « Les envoûtés » de Witold Gombrowicz.
 
Je ne connaissais absolument pas cet auteur mais après quelques recherches sur le net, je me suis rendue compte que cet écrivain polonais (1904-1969) était reconnu comme l’un des plus grands auteurs du XXe siècle. C’est étrange mais « Les envoûtés » ne me semblait pas être une œuvre impérissable d’un grand auteur.

En fouinant un peu plus, je me rends compte que  « Les envoûtés » avait été publié à l’époque où le jeune Gombrowicz voulait écrire un mauvais roman avant tout alimentaire et bien populaire. Pari réussi puisque « Les envoûtés » sera publié en feuilleton dans deux quotidiens polonais durant l’été 1939 en échange de très bons honoraires. Je vous brosse en grandes lignes les péripéties de ce roman qui faillit ne jamais voir le jour dans la mesure où l’attaque allemande contre la Pologne conduira à l’interruption de la publication des deux quotidiens polonais. Il aura fallu attendre l’année 1986 avant de mettre la main sur les trois derniers chapitres. Si cela ne tient pas du miracle… rhu rhu...
 
« Les envoûtés »  est un roman gothique et d’épouvante. Nous y retrouvons tous lieux communs du genre : un château lugubre surgit du brouillard et de la forêt, des dédales et des souterrains pour y parvenir, des phénomènes de possession, la présence d’un esprit malin, …
 
Mais il y a aussi d’autres éléments moins habituels comme l' analyse psychologique qui conduit Witold Gombrowicz à s’interroger sur la notion d’identité. L’analyse sociologique n’est pas en reste : nous sommes en présence d’une société constituée de classes cloisonnées qui ont bien du mal à se côtoyer tels que la grande et moyenne noblesse déclinante, les demi-mondains arrogants et les milieux populaires, société où l’ambition sociale joue un rôle de première importance quels que soient les moyens utilisés.
 
L'auteur a tout de même bien du mal à aller jusqu’au bout du genre fantastique, le dénouement faisant appel à une rationalité de bon aloi.
 
« Les envoûtés »  n'est donc pas une oeuvre majeure  de l'auteur (quelque longueurs, l’ensemble un peu décousu, quelques invraisemblances) mais il m’a donnée envie d’en savoir plus sur Witold Gombrowicz, à suivre donc !
 
A noter que ce n’est que quelques jours avant sa mort, en juillet 1969, que Gombrowicz revendiqua l’œuvre dans sa biographie : « Je suis néanmoins porté à croire que cette idée de "mauvais roman" fut l'apogée de ma carrière littéraire - jamais, ni avant ni après, je n'ai conçu d'idée plus créatrice. »  


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