A travers la dramatique confrontation de deux hommes autrefois amis,
« Les Braises » évoque cette inéluctable avancée du temps. Livre de
l'amitié perdue et des amours impossibles, où les sentiments les plus violents
couvent sous les cendres du passé, tableau de la monarchie austro-hongroise
agonisante, ce superbe roman permet de redécouvrir un immense auteur dont
l'œuvre fut interdite en Hongrie jusqu'en 1990
Vous aimez Stefan Zweig ? Alors vous aimerez Sándor Márai !
L’auteur ausculte la psychologie humaine avec tellement de talent que je me
demande par quel mystère je n’ai jamais lu un roman de Sándor Márai avant
ce jour ? L’amitié trahie, les amours contrariés, la passion, la lâcheté,
l’égoïsme, la suffisance et la prétention, l’agonie d’un monde qui se meurt et
le vieillissement, tels sont les thèmes principaux de ce roman. Le tout
porté par une belle plume dans l’atmosphère froide du château d'un vieil
aristocrate hongrois aux nombreuses pièces fermées depuis la mort de sa femme,
ultime huis clos où se confronteront, autour d’une table spécialement dressée
pour l’occasion, deux amis vieillissants qui ne sont plus vus depuis plus
de 40 ans. Tout comme Stefan Zweig, Sándor Márai ne s’illustre pas dans
l’optimisme des relations humaines : les hommes et les femmes se
rencontrent bien à un moment ou un autre de leur existence mais c’est pour
mieux s’en éloigner davantage jour après jour, aboutissant au final à un
éloignement définitif sans retour en arrière possible. L’envie, le ressentiment,
la trahison, la déception, l’orgueil et la vanité : tels sont les sentiments
qui finissent par entraver la route de toute relation affective. Car l’amour et
la haine n’ont décidément jamais été aussi proches…
Notez que ce roman laisse une certaine liberté au lecteur dans la mesure où
certaines questions demeurent sans réponses claires et précises. Difficile d’en
parler ouvertement ici sans trop dévoiler du roman, même si j’aurai volontiers
aimé connaître votre opinion à ce sujet, à savoir quels sont vos
interprétations quant à ce qui s’est réellement passé ? Comment
interpréter les silences de l’un aux accusations de l’autre ?
Ceci dit, quelques redites, de nombreux monologues et un style un peu
académique peuvent en rebuter plus d’un, qui pourrait trouver ce livre
ennuyeux, ce qui ne fut pas du tout mon cas, je le précise.
J’ai d’ailleurs suffisamment apprécié son style pour avoir ajouté deux
romans supplémentaires de Sándor Márai dans ma PAL depuis cette
lecture : « L'Héritage d’Esther » et « Le premier
amour ». Je l’ai peut-être découvert tardivement, mais il
n’est jamais trop tard pour combler ce regrettable retard !
« Sur les clenches des portes, on sentait le tressaillement d’une main qui, dans un moment de révolte, s’était refusée jadis à achever son geste. Tous les foyers dans lesquels la passion étreint des hommes, de tout sa force, dégagent une pareille ambiance inquiétante.»
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