vendredi 5 décembre 2014

L’incinérateur de cadavres de Juraj Herz


Incinérateur de cadavres au crématorium de Prague, Monsieur Kopfrking mène une vie de famille paisible tout en accordant à son métier toute l’attention nécessaire pour accomplir le mieux possible son travail, qui le fascine. Et puisque Monsieur Kopfrking croit au bouddhisme, il ne doute pas un instant qu’il accélère le processus de réincarnation des âmes en privilégiant la crémation. Après l’invasion allemande du pays, une connaissance nazie le persuade qu’il a du sang allemand dans les veines. Et voilà que Monsieur Kopfrking se met à rêver d’une race pure et de la nécessité de délivrer ceux qui ne le sont pas. Son crématoire va pouvoir tourner à plein régime…

Quel film étrange ! S’il est vrai que Monsieur Kopfrking nous est présenté comme un bon père de famille (ce qui ne l’empêche pas d’être un client régulier d'une maison close), on ne peut que frémir devant un tel personnage lorsque celui-ci met ses obsessions, sa méticulosité et son fanatisme au service du nazisme. Lorsqu'un homme ordinaire se transforme en criminel tuant de sang-froid pour satisfaire les exigences d'une nouvelle religion dont il serait le prochain  Messie. Mais est-ce vraiment un homme si ordinaire que cela ? Pas si sûre, tant cette personnalité narcissique, qui pense être mandaté par les instances supérieures pour devenir l'élu qui libérera les âmes des races impures, trouvera enfin l'occasion de satisfaire ses penchants mégalomaniaques en exaltant son sentiment de tout-puissance. 

L'originalité de la mise en scène, les cadrages surprenants, la musique et le montage parfois syncopé donnent toute la particularité à ce film insolite qui navigue parfois entre l’onirisme et le surréalisme, tout en basculant progressivement dans la démence et la plus grande noirceur. Une violence aseptisée qui ne peut que susciter le malaise chez le spectateur. L’interprétation de ce bourgeois par l’acteur Rudolf Hru Insky, avec toutes ses maniaqueries, son apparente bienveillance et ses petits gestes affectueux répétitifs annonciateurs de méfaits, est tout simplement de haut vol.

Adapté du roman éponyme de Ladislav Fuks, le tournage de ce film débutera en 1968 mais ne sortira en salle qu'en octobre 2000, suite à la censure communiste qui frappera la Tchécoslovaquie.





Titre original : Spalovač mrtvol
Réalisateur : Juraj Herz
Acteurs : Rudolf Hrusinsky , Vlasta Chramostova , Jana Stehnova
Scénario : Ladislav Fuks et Juraj Herz, d'après le roman éponyme de Ladislav Fuks
Nationalité : Tchécoslovaque
Format : Noir et blanc
Date de production : 1969
Date de sortie : 25 octobre 2000
Durée : 1h36min

2 commentaires:

  1. Une vraie découverte, ça, dis donc ! Pas forcément d'humeur pour ce genre de choses tout de suite, mais tu donnes envie de le voir. Merci.

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  2. Ce film a sa petite réputation en tout cas, à voir, ne fusse que par curiosité ;-)

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