Si le film Nosferatu le Vampire (Nosferatu, eine Symphonie des Grauens) de Friedrich W. Murnau, librement adapté du roman Dracula de Bram Stoker, est tourné principalement en extérieurs, il n’en demeure pas moins marqué par l’expressionnisme allemand dans le choix des angles de prise de vue et la création d'une atmosphère inquiétante par le jeu des lumières et des ombres. La belle photographie du film est due à Fritz Arno Wagner (considéré comme l’un des trois grands chefs opérateurs du cinéma expressionniste allemand, avec Karl Freund et Carl Hoffmann) et à l’autrichien Günther Krampf. Albin Grau, producteur et concepteur de production, réalise les décors, les costumes, le storyboard et le matériel promotionnel du film.
L'acteur Max Schreck (schreck signifie « terreur » en allemand) incarne Nosferatu avec une telle véracité qu'il suscite les rumeurs les plus folles : il serait mort pendant le tournage du film, aurait été remplacé par Murnau en personne et serait en fait un véritable vampire.
L'Ombre du vampire (Shadow of the Vampire, 2000) du réalisateur E. Elias
Merhige revient sur l'ambiance très particulière du tournage de Nosferatu de Murnau, avec l'acteur Willem Dafoe dans le rôle de Max Schreck. Le film de E. Elias Merhige
n'est pas une franche réussite mais il est tout de même à voir par
curiosité.
Willem Dafoe dans L'Ombre du vampire de E. Elias Merhige |
Si Nosferatu le Vampire de Friedrich W. Murnau ne fera pas grande impression au moment de sa sortie, il est à présent considéré comme l’un des plus grands films de l’histoire du cinéma. Il symbolise une Allemagne encore rongée par la défaite et en proie aux incertitudes morales, politiques et économiques de son époque.
Nosferatu, fantôme de la nuit (Nosferatu Phantom der Nacht, 1978) de Werner Herzog s'inspirera fortement de l’œuvre de Murnau, avec cette fois Klaus Kinski dans le rôle du vampire.
Klaus Kinski dans Nosferatu, fantôme de la nuit de Werner Herzog |
Et pour terminer ce billet, j'aimerais mentionner quelques films marquants du cinéma muet de l'année 1922 :
• L’Ouragan de la montagne de Julien Duvivier est le premier film franco-allemand réalisé depuis la Grande Guerre. Sont réalisés également La femme de nulle part de Louis Delluc, L’empereur des pauvres de René Leprince, L'Arlésienne d'André Antoine, Le fils du flibustier de Louis Feuillade, La maison du mystère (10 épisodes) d'Alexandre Volkoff, La roue d'Abel Gance.
• Une bagarre générale éclate pendant la projection du film La réception de Madame du Barry d'Ernst Lubitsch à l’Artistic Cinéma de Paris : une campagne orchestrée par les journaux d’extrême droite dénonce avec violence les films étrangers dont le sujet est l’histoire de France, considérant ces films comme des produits de la « propagande anti-française ». Certains en viennent à envahir les salles de cinéma pour empêcher leur projection et à frapper les spectateurs venus voir le film.
La réception de Madame du Barry d'Ernst Lubitsch |
• La production allemande prolifère. Sortent sur les écrans les films suivants : Aimez-vous les uns des autres (Die Gezeichneten) de Carl Theodor Dreyer, La femme du pharaon (Das Weib des Pharao) d'Ernst Lubitsch. Sont réalisés les films suivants : Docteur Mabuse le joueur (Doktor Mabuse, der Spieler, un film en deux parties) de Fritz Lang, Le Fantôme (Phantom) de Friedrich Wilhelm Murnau, Lucrèce Borgia de Richard Oswald, La Terre qui flambe (Der Brennende Acker) de Friedrich Wilhelm Murnau, La Noce au pied de la potence (Vanina oder Die Galgenhochzeit) de Arthur von Gerlach.
Conrad Veidt dans Lucrèce Borgia de Richard Oswald |
• Nanouk l’Esquimau (Nanook of the North) de Robert Flaherty triomphe dans la plus grande salle de New York, le Capitole
Nanouk l’Esquimau de Robert Flaherty |
• Häxan ou La Sorcellerie à travers les âges de Benjamin Christensen sort sur les écrans de la capitale suédoise
Häxan ou La Sorcellerie à travers les âges de Benjamin Christensen |
• « De tous les arts, le cinéma est pour nous le plus important » déclare en substance Lénine, qui décide d’utiliser le cinéma comme outil de propagande pour éduquer le peuple.
Sources pour écrire ce billet :
• Le Cinéma Muet de Vincent Pinel, Éditions Larousse, 2010
• Chronique du Cinéma, sous la direction de Jacques Legrand, Éditions Chronique, 1992
• Wikipédia
'Il est des mots lugubres comme l'appel d'un oiseau de la mort. Garde-toi de les dire ou ta vie sera peuplée d'ombres et les fantômes qui hanteront tes rêves se nourriront de ton sang....'
RépondreSupprimer"Mais il se trouve que j'aime l'ombre et la pénombre et apprécie par-dessus tout pouvoir me retrouver seul avec mes pensées."
SupprimerMerci à toi pour cette très belle citation :)
Chapeau bas! pour cet article sur le cinéma des années vingt ça évite qu'on ait la mémoire courte. Passes de très bonnes fêtes (demain je publie un commentaire de film en noir et blanc qui devrait te plaire)
RépondreSupprimerMerci Alex ! Outre le fait de partager un film qui me tient à cœur, ce billet me permet de garder une trace de quelques films de référence de cette année-là, à voir "plus tard". Je te souhaite de passer de très bonnes fêtes également. Et je lirai avec plaisir ta petite surprise de demain :)
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