samedi 29 août 2009

La mécanique du coeur de Mathias Malzieu

Quatrième de couverture

Edimbourg, 1874. Jack naît le jour le plus froid du monde et son cœur en reste gelé. Mi-sorcière mi-chaman, la sage-femme qui aide à. l'accouchement parvient à sauver le nourrisson en remplaçant le cœur défectueux par une horloge. Cette prothèse fonctionne et Jack vivra, à condition d'éviter toute charge émotionnelle : pas de colère donc, et surtout, surtout, pas d'état amoureux. Mais le regard de braise d'une petite chanteuse de rue mettra le cœur de fortune de notre héros à rude épreuve prêt à tout pour la retrouver, Jack se lance tel Don Quichotte dans une quête amoureuse qui le mènera des lochs écossais jusqu'aux arcades de Grenade et lui fera connaître les délices de l'amour comme sa cruauté. Conte désuéto-moderne mâtiné de western-spaghetti, La Mécanique du Cœur vibre d'une rugueuse force poétique où l'humour est toujours présent. Mathias Malzieu soumet aux grands enfants que nous sommes une réflexion très personnelle sur la passion amoureuse et le rejet de la différence, donnant naissance à un petit frère de Pinocchio qui aurait fait un tour chez les Freaks de Todd Browning.

Mon billet sera très court mais ira à l’essentiel : quel délicieux roman !
Truffé de poésies et de fantaisies, ce conte pour adultes ne pourra que ravir les lecteurs ayant gardé leur âme d’enfant. Il y a du Tim Burton dans ce Mathias Malzieu là, le récit lorgnant plus du côté gothique et mélancolique que du conte de fée.  Un vrai bonheur de lecture que je conseille vivement aux lecteurs qui aiment se laisser porter par leur imaginaire, d’autant plus qu’il est paru depuis quelques mois en format poche, alors pourquoi s’en priver encore ?   


vendredi 28 août 2009

Le livre de Joe de Jonathan Tropper

Quatrième de couverture

A première vue, Joe Goffman a tout pour lui : un magnifique appartement dans les quartiers chics de Manhattan, des aventures sentimentales en série, une décapotable dernier cri et des dollars comme s'il en pleuvait. Ce jeune auteur a très vite rencontré le succès avec son premier roman, Bush Falls. Directement inspiré de son adolescence passée dans une petite bourgade du Connecticut, ce best-seller ridiculise les mœurs provinciales de ses ex-concitoyens, dénonce leur hypocrisie, leur étroitesse d'esprit et toutes leurs turpitudes. Mais le jour où il est rappelé d'urgence à Bush Falls au chevet de son père mourant, il se retrouve confronté aux souvenirs qu'il croyait enfouis à jamais. Face à l'hostilité d'une ville entière, rattrapé par les fantômes de son passé, Joe va devoir affronter ses propres contradictions et peut-être enfin trouver sa place...


Mon avis

Voilà un roman qui ne suscite que des louanges alors qu’il n’est jamais parvenu à me convaincre : le présence en très grand nombre de grosses ficelles et de clichés en tous genres ont fait que j’ai eu bien du mal à croire aux personnages, que je trouvais inconsistants et caricaturaux. Un roman qui m’a fait pensé à un scénario de film tellement certaines scènes se visualisaient sans peine et semblaient prêtes à l’emploi pour une prochaine adaptation cinématographique, dans le pure style comédie américaine - plaisante et sans prétention - de série B, à laquelle ne manquera pas l’épisode larmoyant précédant le happy end final.

Vous l’aurez compris, je suis déçue et ma déception est à la hauteur de mes attentes initiales : j’espérais un roman caustique, enlevé et original et je me suis retrouvée avec un roman prévisible, gentillet et sans surprise. Je me suis également très vite lassée de l’écriture fluide mais très banale de l’auteur. Encore un best-seller qui me passe complètement sous le nez, je suis même frustrée de ne pas pouvoir partager l’enthousiasme des autres lecteurs, c’est dire ! Bref, ce roman est loin d’être une révélation en ce qui me concerne…  


mercredi 19 août 2009

Quelque chose à te dire de Hanif Kureishi

Quatrième de couverture

Jamal, psychanalyste d’une cinquantaine d’années, connaît un certain succès. Suivant le rythme de ses consultations, professionnelles et amicales, sa vie est marquée par la régularité et l’écoute. Cette sérénité apparente masque néanmoins de nombreux tourments personnels. Jamal n’a rien oublié de son enfance dans la banlieue des années 1970, d’un premier amour dont il n’a pas fait le deuil, et d’un événement tragique qui continue à le hanter… Tout vacille lorsque deux témoins d’un passé longtemps refoulé ressurgissent dans sa vie…

Hanif Kureishi restitue avec brio la liberté, l’euphorie et les luttes sociales qui ont marqué l’Angleterre pendant quarante ans. Il donne vie à des personnages magnifiques qui cherchent à donner un sens à leur existence chaotique.


Quel roman foisonnant !

« Quelque chose à te dire » est le premier roman que je lis de Hanif Kureishi, mais ce ne sera certainement pas le dernier. Il est d’ailleurs loin d’être le premier venu, étant l’auteur de nombreux romans dont « My Beautiful Laundrette » (adapté au cinéma par Stephen Frears) et « Le Bouddha de banlieue », pour ne citer que ces deux romans.

Etant fils d'immigré pakistanais, Hanif Kureishi nous plonge dans la communauté anglo-pakistanaise de Londres et les problèmes identitaires générés par le brassage des cultures sans pour autant délaisser d’autres thèmes plus universels tels que le bilan d’un quinquagénaire qui vient de se séparer de sa femme, le sentiment de culpabilité, la résurgence des actes passés, le poids du secret et des regrets, l’amitié, la famille, les problèmes de couple, le manque de désir, la paternité, la sexualité, les occasions manquées … le tout porté par une galerie de personnages hauts en couleurs avec comme toile de fond l’Angleterre des années 70 aux attentats dans le métro de l’année 2005.

Personnages hauts en couleurs mais aussi terriblement attachants, bien que ce n’était pas si évident que cela au départ : Hanif Kureishi a beau promener ces personnages dans les endroits les plus glauques de Londres, allant du bar à stripteaseuses aux soirées échangistes en passant par le bordel, sans oublier la drogue, l’alcool, les milieux huppés des stars et les petites magouilles en tous genres, il n’arrive jamais à nous en détourner un seul instant. Contrairement aux apparences, nous sommes en effet bien loin de l’univers de Houellebecq : on ne peut qu’éprouver un certain attendrissement face à ces hommes et femmes en manque de repères essayant tant bien que mal de s’y retrouver dans une vie tumultueuse et désordonnée.

Les confessions de Jamal, psychanalyste à la ville, pourront désorienter certains lecteurs de par l’ampleur des thèmes abordés et les digressions multiples qui jalonnent ce roman, donnant parfois l’impression d’un récit décousu et trop bavard. Il n’en fut rien en ce qui me concerne, ayant beaucoup apprécié me perdre dans les méandres des pensées de Jamal, qui porte un regard sans complaisance sur son époque et les faiblesses de ses contemporains sans pour autant être dénué de tendresse et de compassion.

Une peinture multiculturelle londonienne douce-amère mais non dépourvue d’humour et de dialogues souvent savoureux d’un homme à mi-parcours de sa vie au ton subtil et sensible. Un très bon roman !

Extraits choisis :

« Je suis psychanalyste ; ou, pour le dire autrement, je suis un décrypteur d’esprits et de signes. Il arrive également qu’on m’appelle dépanneur, guérisseur, enquêteur, serrurier, fouille-merde ou, carrément, charlatan, voire imposteur. Tel un médecin allongé sous une voiture, je m’occupe de tout ce qui se trouve sous la capot, sous l’histoire officielle : fantasmes, souhaits, mensonges, rêves, cauchemars – le monde qui se cache sous le monde, le vrai sous le faux. Je prends donc au sérieux les trucs les plus bizarres, les plus insaisissables ; je vais là où le langage n’a pas accès, là où il s’arrête, aux limites de “l’indicible” – et tôt le matin, qui plus est. »

« Pour lui, comme pour les autres psys tendance baba, une analyse n'était pas faite pour transformer les gens en conformistes respectables mais pour les laisser être aussi fous qu'ils le souhaitaient, vivant pleinement et assumant leurs conflits - même au prix de plus grandes souffrances - sans s'autodétruire. Je l'ai compris assez vite, quand il a cité Pascal : "Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou que de n'être pas fou." »

« Vous savez, Maria, j'ai compris que j'étais fichu quand j'ai décidé de me mettre à l'aquarelle... »

mardi 11 août 2009

L'enfant de cristal de Theodore Roszak

Quatrième de couverture

Julia Stein, une brillante gérontologue, se voit confier un cas exceptionnel, Aaron Lacey, un enfant atteint de progéria. Quand ses parents le lui confient, il présente tous les signes de la vieillesse : petit, voûté, la vue faible, le crâne chauve. Touchée par Aaron, Julia tente tout ce qu'elle peut pour lui venir en aide, quitte à user de méthodes peu conventionnelles. Commencent alors chez Aaron, dont le corps est épuisé, une série de métamorphoses qui vont en faire un être exceptionnel, d'une intelligence rare, d'une sensibilité peu commune, d'un savoir iconoclaste. Après diverses péripéties, Aaron va fuir son entourage et se retrouver au fin fond de la campagne mexicaine, dans l'étrange propriété d'un extravagant docteur DeLeon, dont les travaux sur le vieillissement sont plus que sujets à caution...


Mon avis

Critique d'une société dans laquelle la condition humaine est de plus en plus médicalisée et aux ordres d'une philosophie rationnelle et scientifique, L'Enfant de cristal est aussi une bouleversante réflexion sur le corps, la vieillesse et le temps qui passe.

J’aime bien en général Theodore Roszak, mais là, j’avoue être restée un peu sur les quais… L’auteur excelle d’habitude dans le mélange des genres mais je trouve qu’il y réussit moins bien avec ce roman, qui penche tout de même un peu trop du côté du mysticisme pour me convaincre totalement.

Et pourtant, ce roman avait tout pour me plaire, les thèmes abordés étant des plus intéressants : la question du temps, de la vieillesse, de la mortalité, de la corporalité. Mais le propos est tellement obscur et ésotérique que nous avons l’impression que l’auteur se métamorphose en une sorte de gourou messianique au discours abscons et hermétique. Un roman entamé donc avec envie et motivation mais qui peu à peu s’essouffle par incompréhensions diverses et théories vaseuses. La critique de la société du paraître et du jeunisme à tous crins est par contre très bien menée. Un roman original mais étrange et assez déroutant au final.

lundi 3 août 2009

La délégation norvégienne de Hugo Boris

Quatrième de couverture
 
 " Est-ce l'alcool en carafon, le cuir brun, le mobilier vieux chêne, le feu qui crépite dans la cheminée ? Ce climat anglais où l'on s'assassine en grignotant des scones et en buvant du thé ? Il lui semble que chaque chose est bien à sa place, que chaque personne autour de cette table est un peu trop racée pour être honnête. S'appelle-t-on Ethel Brakefield dans la vie ? Ou Ernst von Sydow ? Ou même Lucas Cranach ? "

Un relais de chasse absent de tous les guides spécialisés. Cinq hommes, deux femmes, qui viennent des quatre coins de l'Europe et ne se connaissent pas. Sept chasseurs pris par la neige, qui doivent se défendre du froid, de la faim, de la paranoïa qui les guette. Prisonniers ? D'une île à la rigueur, mais d'une forêt ? Ils le sont pourtant, serrés par les arbres, piégés par la neige. L'un d'eux commence à douter : et s'ils n'étaient pas victimes du hasard, de la malchance ? Au fil des pages, René Derain acquiert la conviction qu'il est condamné, qu'il va mourir. Non pas de froid, de fatigue, de gangrène ; il sera assassiné. Il sent, dans son dos, le souffle d'une intelligence. Il sait qu'ils sont devenus de vulgaires pantins. Et que le piège ne demande qu'à se refermer. Un style vif et moderne, des personnages énigmatiques et ambivalents, La Délégation norvégienne est un roman fantastique au climat lourd et oppressant. Une mise en abyme vertigineuse !
C’est la piqûre de rappel de cathulu, dans son billet consacré à la sortie poche de ce roman, qui m’a remis en mémoire ce livre qui m’avait tapé dans l’œil à l’époque de sa parution et que j’avais un peu oublié entre-temps. Oubli réparé depuis lors !

Encore un roman qui se lit d’une traite avec plaisir mais qu’on referme en se disant qu’on en attendait plus. J’aime beaucoup les atmosphères oppressantes et les huis clos où un ensemble d’individus qui ne se connaissaient pas au départ doivent unir leurs forces pour lutter contre un oppresseur inconnu. La neige, le froid, la forêt, l’isolement constituent donc les ingrédients indispensables au genre et sont plutôt bien rendus. Dommage que les personnages aient si peu d’épaisseurs ! J’ai bien aimé aussi le traitement fantastique mais quel dommage également d’avoir déjà rencontrer le procédé utilisé dans d’autres œuvres, qu’elles soient cinématographiques ou littéraires. Au final, un bon roman qui se lit très vite, qui nous prend aux tripes et ce malgré le peu de consistance des personnages et le côté déjà-vu du procédé fantastique. Mais étant assez fan du genre, il se peut que des lecteurs moins assidus dans ce domaine soient totalement pris au dépourvu et pourront de ce fait mieux savourer tout le sel de l’histoire.

A noter : le dernier cahier du livre n'est pas massicoté sans pour autant que ce soit un défaut de l'éditeur. C’est au lecteur de passer au coupe-papier les dernières pages pour en connaître la fin, participant ainsi de plein pied à l’intrigue qui s’offre à nous.

Et pour terminer, n’attendez pas non plus que l’auteur vous donne toutes les cartes en main pour répondre à toutes vos questions : de nombreux coins sombres ne déroberont à vos tentatives de compréhension et de nombreuses questions resteront en suspend.