Persona (1966) d'Ingmar Bergman
« Ah, Bergman, pour te foutre le blues, c’est le
chef d’escadrille. »
Le sourire de Claude Miller, avec Jean-Pierre Marielle
« Tant de fantômes, de démons, d'êtres surnaturels sans nom, ni lieu, m'ont entouré depuis mon enfance. »
«
Oui, c'est vrai, j'ai de la tension, j'en ai depuis qu'il m'a fallu passer par une période d'humiliation et d'avilissement, les joues me brûlent et j'entends quelqu'un qui hurle, peut-être est-ce moi. »
|
Le cri (détail) d'Edvard Munch |
« Fantômes, diables, démons, bons, méchants ou simplement contrariants. Ils m'ont soufflé au visage, bousculé, piqué avec des épingles, ils m'ont attrapé par le bout de mon chandail. Ils m'ont parlé, sifflé, chuchoté : des voix claires, pas particulièrement intelligibles, mais impossibles à ignorer. »
Extraits de Laterna Magica d'Ingmar Bergman
|
Squelette arrêtant masques (1891) de James Ensor
|
« En se confrontant avec ses démons, il a fait un travail de catharsis. Il a, en fait, dansé avec ses démons. »
Liv Ullmann
« Je n’ai jamais vu un auteur qui filme sa vulnérabilité avec tant de générosité. La grandeur de Bergman vient de sa vulnérabilité magnifique.
Pour moi, et je pense que c’était le cas chez lui aussi, écrire un film est une façon de se battre avec soi-même et de retrouver momentanément, quand le film est écrit, une forme d’harmonie et de structure. »
Joachim Lafosse
« Bergman n'est pas obscène, il est indécent. »
Jeanne Moreau
« Ce ne sont pas des films aimables. »
Philippe Lioret
Je ne contredirai pas Philippe Lioret à propos des films d'Ingmar Bergman, qui traitent tour à tour de thèmes aussi réjouissants que la famille et la transmission de ses névroses, du couple, de la femme, de l'amour, du désir, de la mort (Eros et Thanatos, très présents dans son œuvre), mais aussi de la maladie, de la religion, de la foi, de la perte et du retour vers le passé sans complaisance lorsque l'heure du bilan est venue. Un cinéma exigeant, et de ce fait des films très peu diffusés à la télévision. Il faut se rabattre sur les DVD, les cinémathèques ou les divers festivals pour avoir la possibilité de voir ses films, tout en s'armant de courage et de volonté pour affronter la foudre bergmanienne, avec ses masques qui tombent et les vérités qui blessent.
Aujourd'hui, cela fait exactement cent ans que naissait Ingmar Bergman, à Uppsala. Des réalisateurs aussi prestigieux que Kubrick (The Shining), Tarkovski (Le sacrifice), David Lynch (Mulholland drive), Lars Von Trier ou Woody Allen l’ont cité pour modèle. Ce qui frappe dans les films de Bergman est notre sentiment qu'il y a beaucoup de choses intimes et très personnelles dans son cinéma, bien sûr transformées, romancées, mensongères et manipulées, hystérisées même, mais le substrat est on ne peut plus authentique et sensible, tant la plaie semble encore à vif et à jamais incicatrisable.
« Au lieu de visages, nous a-t-on donné des masques à porter ? au lieu de sentiments, nous a-t-on inculqué l'hystérie ? »
« Pourquoi
a-t-on fait de mon frère un infirme ? Pourquoi ma sœur a-t-elle été
réduite à un cri ? Pourquoi ai-je vécu avec une blessure toujours
infectée qui ne s'est jamais refermée et qui me transperçait tout
entier ? »
« (...) je tombe, je tombe et je traverse l'abîme de la vie sans pouvoir me raccrocher à rien. Cet abîme est un fait. De plus c'est un abîme qui n'a pas de fond, on ne se tue même pas en s'écrasant sur un rocher ou un miroir d'eau tout au fond. »
« Je prie Dieu, sans confiance. Il faudra, sans doute, se débrouiller tout seul, comme on pourra. »
« (...)
tu nais sans l'avoir demandé, tu vis sans sans que cela ait un autre
sens que celui de vivre. Lorsque tu meurs, tu t'éteins. Tu étais un
être, tu te transformes en non-être. Il n'y a pas nécessairement un
dieu qui régisse nos atomes de plus en plus capricieux.
Ce savoir m'a donné une espèce de sérénité qui a résolument chassé en moi l'angoisse et le tumulte. »
Extraits de Laterna Magica, autobiographie d'Ingmar Bergman
|
Le réalisateur Ingmar Bergman |
Pour mieux connaître Ingmar Bergman, je ne peux que vous conseiller de lire son autobiographie
Laterna Magica, publiée en 1987. Il revient longuement sur la genèse de son œuvre à travers le vécu de son enfance et adolescence, fils d'un pasteur luthérien à la morale rigide et d'une mère dominatrice. Un témoignage dans lequel il se flagelle volontiers, se présentant comme arrogant, égoïste, maladif, menteur et fabulateur, une personne dotée d'une imagination débordante pour mieux affronter ses fantômes du passé et qui a porté le choix de la schizophrénie comme modèle de survie. Coupé de ses sentiments en s'observant et se mettant en scène, «
une maladie professionnelle qui m'a suivi impitoyablement à travers toute ma vie et qui a si souvent escamoté ou désagrégé mes expériences les plus profondes . »
S'il ne fallait ne voir que quelques films de Bergman, voici la liste des films conseillés :
- Le septième sceau (1957)
- Les fraises sauvages (1957)
- Persona (1966)
- Scènes de la vie conjugale (1973)
- Sonate d'automne (1978)
- Fanny et Alexandre (1982)
|
Le septième sceau (1957) d'Ingmar Bergman |
|
Les fraises sauvages (1957) d'Ingmar Bergman |
|
Fanny et Alexandre (1982) d'Ingmar Bergman |
A lire également, sur ce blog :