La Pluie,
avant qu'elle tombe est le dernier roman de Jonathan Coe, un auteur
que j’aime beaucoup et qui ne m’a jamais déçue. Ce roman ne fera pas
exception à la règle, même si je le trouve très différent
de ceux que j’ai lus précédemment.
Revenons d’ailleurs un peu à ses précédents romans avant de commenter sa dernière parution, qui surprendra ses fans de la première heure. Jonathan Coe, considéré comme l'un des auteurs majeurs de la littérature britannique actuelle, a connu son premier succès en France avec son époustouflant roman Testament à l’anglaise. Satire au vitriol de l'establishment britannique des années Thatcher à travers l'analyse de chaque membre d'une illustre famille anglaise occupant tous les postes-clés dans l'Angleterre des années quatre-vingt, Jonathan Coe combine analyse politique, sociale, psychologique avec ce qu'il faut d'humour british et de cynisme pour nous concocter un roman d'une grande réussite. Suite à cette grande fresque du temps du thatchérisme, il poursuivra dans la même veine politique avec le dyptique Bienvenue au club et Le cercle fermé, mais cette fois en abordant les années 70 dans le premier tome et le blairisme des années 90 dans le second tome. Si ces deux ouvrages sont à nouveau très ancrés dans la vie politique de l’Angleterre contemporaine, Jonathan Coe n’en oublie pas pour autant de combiner la petite histoire à la grande histoire en suivant pendant toutes ces années l’évolution de ses personnages, de l’adolescence à l’âge adulte. Le cercle fermé approfondit notamment le passage délicat de la quarantaine, âge charnière où tous nos choix et nos actes se confrontent à nos idéaux de jeunesse et où l’heure de régler les questions laissées en suspend s’impose pour aller de l’avant au risque de rester sur les quais définitivement. Pour être tout à fait honnête, je pense que ses autres romans, Les nains de la mort et La femme de hasard, jouent sur un autre registre que ceux cités ci-dessus mais je ne saurais en dire plus dans la mesure où je ne les ai pas encore lus.
Son dernier roman, La Pluie, avant qu'elle tombe , se différencie nettement de ses précédents romans politiques dans la mesure où il se veut plus intimiste que ces prédécesseurs. S’il délaisse la critique politique teintée d’ironie toute britannique, c’est pour mieux nous mener vers un roman plus sombre et plus mélancolique que jamais, plus centré aussi sur une même thématique et une même tonalité. Un roman plus simple, plus linéaire, plus feutré, à l’intrigue moins complexe mais au récit plus pur, plus intime, plus grave, plus concentré aussi.
La Pluie, avant qu'elle tombe est l’histoire de trois générations de femmes, Beatrix, Thea et Imogen. Si nous transmettons notre matériel génétique à notre descendance, nous lui transmettons également nos doutes, nos frustrations, nos colères, nos nœuds jamais dénoués, nos douleurs aussi. Il se fait que cette transmission sur trois générations de femmes, mères et filles se léguant le malheur en héritage, aura un témoin : Rosamond, une vieille tante qui vient de décéder. Rosamond s’en est allée en laissant au préalable une confession enregistrée adressée à la mystérieuse Imogen, perdue de vue depuis des années. S'appuyant sur vingt photos soigneusement choisies, Rosamond laisse libre cours à ses souvenirs et raconte, des années quarante à aujourd'hui, l'histoire de ces trois femmes. Quatre cassettes de 90 minutes que nous écouterons à notre tour et où seront commentés les photos d’un album imaginaire au son de la voix d’une femme aujourd’hui disparue…
Si nous entrevoyons quelque peu l'Angleterre de la seconde moitié du XXe siècle (que ce soit l’Angleterre sous le Blitz, la vie rurale dans le comté du Shropshire après la guerre ou la difficulté de vivre son homosexualité dans les années 70), ce n’est définitivement pas le propos de Jonathan Coe. Il privilégie avant tout le romanesque et le roman psychologique où la fragilité des existences, l’engrenage des répétitions, l’absence du hasard et le poids de la destinée se font la part belle, au point qu’il pourrait susciter à ce niveau une certaine irritation aux tenants d’une vie librement choisie.
Pour terminer ce billet, je dirais que ce roman ne ressemble pas à ces prédécesseurs dans sa forme mais bien dans le fond, certaines thématiques et certaines tonalités refaisant invariablement surface, comme la nostalgie, la mélancolie, le doute ou le regret, qui semblent ici bien plus marqués dans la mesure où il ne recourt plus à cet humour et cette causticité qui faisaient un peu sa marque de fabrique et qui contrebalançaient dans ses précédents romans cette gravité pourtant déjà bien présente.
Un mot aussi sur l’écriture très fluide et très agréable de l’auteur, ce qui ne gâche rien.
Revenons d’ailleurs un peu à ses précédents romans avant de commenter sa dernière parution, qui surprendra ses fans de la première heure. Jonathan Coe, considéré comme l'un des auteurs majeurs de la littérature britannique actuelle, a connu son premier succès en France avec son époustouflant roman Testament à l’anglaise. Satire au vitriol de l'establishment britannique des années Thatcher à travers l'analyse de chaque membre d'une illustre famille anglaise occupant tous les postes-clés dans l'Angleterre des années quatre-vingt, Jonathan Coe combine analyse politique, sociale, psychologique avec ce qu'il faut d'humour british et de cynisme pour nous concocter un roman d'une grande réussite. Suite à cette grande fresque du temps du thatchérisme, il poursuivra dans la même veine politique avec le dyptique Bienvenue au club et Le cercle fermé, mais cette fois en abordant les années 70 dans le premier tome et le blairisme des années 90 dans le second tome. Si ces deux ouvrages sont à nouveau très ancrés dans la vie politique de l’Angleterre contemporaine, Jonathan Coe n’en oublie pas pour autant de combiner la petite histoire à la grande histoire en suivant pendant toutes ces années l’évolution de ses personnages, de l’adolescence à l’âge adulte. Le cercle fermé approfondit notamment le passage délicat de la quarantaine, âge charnière où tous nos choix et nos actes se confrontent à nos idéaux de jeunesse et où l’heure de régler les questions laissées en suspend s’impose pour aller de l’avant au risque de rester sur les quais définitivement. Pour être tout à fait honnête, je pense que ses autres romans, Les nains de la mort et La femme de hasard, jouent sur un autre registre que ceux cités ci-dessus mais je ne saurais en dire plus dans la mesure où je ne les ai pas encore lus.
Son dernier roman, La Pluie, avant qu'elle tombe , se différencie nettement de ses précédents romans politiques dans la mesure où il se veut plus intimiste que ces prédécesseurs. S’il délaisse la critique politique teintée d’ironie toute britannique, c’est pour mieux nous mener vers un roman plus sombre et plus mélancolique que jamais, plus centré aussi sur une même thématique et une même tonalité. Un roman plus simple, plus linéaire, plus feutré, à l’intrigue moins complexe mais au récit plus pur, plus intime, plus grave, plus concentré aussi.
La Pluie, avant qu'elle tombe est l’histoire de trois générations de femmes, Beatrix, Thea et Imogen. Si nous transmettons notre matériel génétique à notre descendance, nous lui transmettons également nos doutes, nos frustrations, nos colères, nos nœuds jamais dénoués, nos douleurs aussi. Il se fait que cette transmission sur trois générations de femmes, mères et filles se léguant le malheur en héritage, aura un témoin : Rosamond, une vieille tante qui vient de décéder. Rosamond s’en est allée en laissant au préalable une confession enregistrée adressée à la mystérieuse Imogen, perdue de vue depuis des années. S'appuyant sur vingt photos soigneusement choisies, Rosamond laisse libre cours à ses souvenirs et raconte, des années quarante à aujourd'hui, l'histoire de ces trois femmes. Quatre cassettes de 90 minutes que nous écouterons à notre tour et où seront commentés les photos d’un album imaginaire au son de la voix d’une femme aujourd’hui disparue…
Si nous entrevoyons quelque peu l'Angleterre de la seconde moitié du XXe siècle (que ce soit l’Angleterre sous le Blitz, la vie rurale dans le comté du Shropshire après la guerre ou la difficulté de vivre son homosexualité dans les années 70), ce n’est définitivement pas le propos de Jonathan Coe. Il privilégie avant tout le romanesque et le roman psychologique où la fragilité des existences, l’engrenage des répétitions, l’absence du hasard et le poids de la destinée se font la part belle, au point qu’il pourrait susciter à ce niveau une certaine irritation aux tenants d’une vie librement choisie.
Pour terminer ce billet, je dirais que ce roman ne ressemble pas à ces prédécesseurs dans sa forme mais bien dans le fond, certaines thématiques et certaines tonalités refaisant invariablement surface, comme la nostalgie, la mélancolie, le doute ou le regret, qui semblent ici bien plus marqués dans la mesure où il ne recourt plus à cet humour et cette causticité qui faisaient un peu sa marque de fabrique et qui contrebalançaient dans ses précédents romans cette gravité pourtant déjà bien présente.
Un mot aussi sur l’écriture très fluide et très agréable de l’auteur, ce qui ne gâche rien.
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