Au lendemain d'une fusillade à Naples, Matteo voit s'effondrer
toute sa raison d'être. Son petit garçon est mort. Sa femme,
Giuliana, disparaît. Lui-même s'enfonce dans la solitude, et, nuit après
nuit, à bord de son taxi vide, parcourt sans raison les rues
de la ville.
Mais, un soir, il laisse monter en voiture une cliente étrange qui, pour paiement de sa course, lui offre à boire dans un minuscule café. Matteo y fera connaissance du patron, Garibaldo, de l'impénitent curé don Mazerotti, et surtout du professeur Provolone, personnage haut en couleur, aussi érudit que sulfureux, qui tient d'étranges discours sur la réalité des Enfers. Et qui prétend qu'on peut y descendre...
Voilà un auteur que j’ai mis du temps à lire : pour une raison obscure, j’avais longtemps flairé de loin « Le soleil des Scorta » (prix Goncourt 2004) avec suspicion et interrogation. Il aura fallu qu'il sorte en livre de poche pour que je me décide enfin à l'approcher d'un peu plus près. Et quelle belle surprise ce fut! J’ai adoré ce roman, qui a su me toucher et m’émouvoir, au point de verser ma petite larme à la fin du récit.
C’est donc avec beaucoup plus d’assurance que je me suis jetée sur son petit dernier, qui est d’ailleurs mon premier achat de cette rentrée littéraire. Et la magie fut à nouveau au rendez-vous ! Les thèmes abordés par Laurent Gaudé me touchent décidemment beaucoup : la mort, le deuil impossible, la frontière poreuse entre la vie et la mort, le voyage impensable, l’invraisemblable devenu réalité. Ce roman flirte quelque peu avec le fantastique, ce qui pourrait rebuter certains lecteurs peu friands de ce genre. Quant à moi, je me suis laissée porter avec délice par l’écriture de Laurent Gaudé : parfois violente, souvent douloureuse mais tellement juste aussi, sans mièvrerie ni apitoiement, malgré le sujet délicat qu’est la mort d’un enfant.
Quand les morts continuent de vivre en nous : « Croyez-moi. Les morts vivent. Ils nous font faire des choses. Ils influent sur nos décisions. Ils nous forcent. Nous façonnent ».
Quand les morts emportent un peu de nous-mêmes : « Chaque deuil nous tue. Nous en avons tous fait l’expérience. Il y a une joie, une fraîcheur qui s’estompent au fur et à mesure que les deuils s’accumulent… Nous mourons chaque fois un peu plus en perdant ceux qui nous entourent ».
Des sentiments forts portés par une écriture âpre sur un sujet qui nous concerne tous, « La porte des enfers » est le roman de l’impossible ou la transfiguration de ce qui est par définition définitif et immuable.
Extrait :
Mais, un soir, il laisse monter en voiture une cliente étrange qui, pour paiement de sa course, lui offre à boire dans un minuscule café. Matteo y fera connaissance du patron, Garibaldo, de l'impénitent curé don Mazerotti, et surtout du professeur Provolone, personnage haut en couleur, aussi érudit que sulfureux, qui tient d'étranges discours sur la réalité des Enfers. Et qui prétend qu'on peut y descendre...
Voilà un auteur que j’ai mis du temps à lire : pour une raison obscure, j’avais longtemps flairé de loin « Le soleil des Scorta » (prix Goncourt 2004) avec suspicion et interrogation. Il aura fallu qu'il sorte en livre de poche pour que je me décide enfin à l'approcher d'un peu plus près. Et quelle belle surprise ce fut! J’ai adoré ce roman, qui a su me toucher et m’émouvoir, au point de verser ma petite larme à la fin du récit.
C’est donc avec beaucoup plus d’assurance que je me suis jetée sur son petit dernier, qui est d’ailleurs mon premier achat de cette rentrée littéraire. Et la magie fut à nouveau au rendez-vous ! Les thèmes abordés par Laurent Gaudé me touchent décidemment beaucoup : la mort, le deuil impossible, la frontière poreuse entre la vie et la mort, le voyage impensable, l’invraisemblable devenu réalité. Ce roman flirte quelque peu avec le fantastique, ce qui pourrait rebuter certains lecteurs peu friands de ce genre. Quant à moi, je me suis laissée porter avec délice par l’écriture de Laurent Gaudé : parfois violente, souvent douloureuse mais tellement juste aussi, sans mièvrerie ni apitoiement, malgré le sujet délicat qu’est la mort d’un enfant.
Quand les morts continuent de vivre en nous : « Croyez-moi. Les morts vivent. Ils nous font faire des choses. Ils influent sur nos décisions. Ils nous forcent. Nous façonnent ».
Quand les morts emportent un peu de nous-mêmes : « Chaque deuil nous tue. Nous en avons tous fait l’expérience. Il y a une joie, une fraîcheur qui s’estompent au fur et à mesure que les deuils s’accumulent… Nous mourons chaque fois un peu plus en perdant ceux qui nous entourent ».
Des sentiments forts portés par une écriture âpre sur un sujet qui nous concerne tous, « La porte des enfers » est le roman de l’impossible ou la transfiguration de ce qui est par définition définitif et immuable.
Extrait :
« Elle se mit à lui frapper la poitrine. Ces coups sur le torse qu’elle lui donnait tout en gémissant – mélange de plainte et de malédiction – n’étaient pas faits pour le meurtrir mais plutôt pour ébranler en lui quelque chose d’obstinément immobile. Il la laissa faire, pensant que ces coups allaient la calmer, mais il y eut ces derniers mots – prononcés avec une colère plus grande encore, ces mots baignés de pleurs qui l’ébranlèrent davantage que les poings serrés qui continuaient de frapper : « Rends-moi mon fils, Matteo. Rends-le-moi, ou, si tu ne peux pas, donne-moi au moins celui qui l’a tué ! »
Il faillit chanceler. Tout tournait dans son esprit, les paroles de Giuliana, le visage de Pippo, la scène de fusillade, ses errances inutiles. Il ne pouvait ni parler, ni rester une minute de plus devant Giuliana. Il écarta doucement ses mains. Elle se laissa faire avec une docilité d’enfant. Il ouvrit alors la porte d’entrée et, sans rien dire, sortit de l’appartement et dévala les escaliers. »
Avant de clôturer ce billet, je ne peux m’empêcher de vous citer sa très belle dédicace en fin du roman :
« J’ai écrit ce livre pour mes morts. Les hommes et les femmes dont la fréquentation a fait de moi ce que je suis. Ceux qui, quel que soi le degré d’intimité que nous avions, m’ont transmis un peu d’eux-mêmes. Certains étaient de ma famille, d’autres, des personnes que j’ai eu la chance de croiser. A eux tous, ils constituent la longue chaîne de ceux qui, en disparaissant, ont emmené un peu de moi avec eux. »
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