Mais qui saura d’où je viens ?
Une
douce mélancolie en toile de fond saupoudrée de quelques touches d’humour
teintées de tendres ironies, l’auteur nous
emmène une nouvelle fois dans un pays imaginaire de l’Amérique latine, vaste
territoire offrant tous les contrastes (géographiques, climatiques, sociaux)
propices au déploiement de l’imagination de l'auteur.
Ce
roman commence là où se terminent en général les contes de fées : un beau
prince charmant sort sa princesse d’une ville pouilleuse au milieu du désert
pour l’emmener dans son château de la Coline Dollar. Vingt ans ont passé, le beau
prince charmant s’est transformé en roi toujours aussi clinquant que
superficiel et creux, le palais de la reine vacille tandis que la princesse,
leur fille Paloma de 18 ans, s’est fait la malle avec un mauvais garçon.
C’est
que la Reine Vida
a payé le prix fort pour s’extraire de sa condition sociale : femme docile,
atone (au point qu’elle aimerait se glisser dans le jardin et disparaître entre
les pierres et les agaves dans ses voiles verts), elle s’est contentée de vivre
à l’ombre de son mari qui ne s’est jamais intéressé à autre chose qu’aux
apparences. La blessure occasionnée par la fuite de Paloma va fissurer à tout
jamais cette cage dorée. L’arrivée du lieutenant Taïbo, venu constater que des
intrus s’étaient installés sans rien voler dans la somptueuse villa de
Villanueva en l’absence du couple, ajoutera sa pierre à ce bel édifice
branlant...
L’importance
des origines et de la transmission, les liens familiaux et conjugaux, la
rupture nécessaire pour se débarrasser de ses derniers oripeaux, l’envol
indispensable pour déployer ses ailes, l’émancipation des femmes tout
simplement.
Véronique
Ovaldé aime ses personnages et nous les aimons à travers elle. Notamment Taïbo,
ce flic placide à l’empathie encombrante qui n’aime pas poser des questions qui
fâchent, souffrant par ailleurs d’un chagrin d’amour qui dure depuis 10 ans. Un
homme tranquille mais néanmoins résolu qui sait regarder ce qui l’entoure.
Quel
beau roman de la rentrée littéraire 2011, peut-être le meilleur à ce jour de
Véronique Ovaldé, qui passe à la vitesse supérieure. Nous ne sommes plus dans
la fable comme dans son précédent roman : les personnages nous sont plus
proches, plus réels, plus palpables, il n’y a plus ce miroir sans tain qui
pouvait frustrer certains lecteurs à la lecture de son précédent roman, Ce
que je sais de Vera Candida.
Mention spéciale pour l’écriture qui contient
beaucoup d’incises intercalées entre parenthèses, l’art de la digression qui
donne toujours sens, qui précise ce qui a été dit précédemment en apportant une
nuance bienvenue, un éclaircissement ou au contraire une interrogation.
Une
très belle réussite et un très bon moment de lecture.
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