samedi 29 juillet 2017

La ferme africaine de Karen Blixen


Descendante d'une famille patricienne du Danemark, la baronne Karen von Blixen-Finecke est née en 1885 près de Copenhague. Elle part en 1914 pour le Kenya afin d'y diriger avec son mari une plantation de café. Après une série d'échecs, elle rentre en Europe en 1931 et se retire dans la demeure familiale de Rungstedlund, où elle se consacre à l'écriture jusqu'à sa mort, en 1962. Des titres comme Le dîner de Babette et Contes d'hiver la rendent célèbre, mais ce sont ses années en Afrique qui lui inspirent son chef-d'œuvre.

Le film « Out of Africa » de Sydney Pollack est l'adaptation cinématographique de « La ferme africaine ».  Il s'agit du recueil de plusieurs nouvelles puisant dans les souvenirs de K. Blixen, qui vécut au Kenya de 1914 à 1931.

Je fus assez surprise au début de ma lecture, car je n'ai pas trouvé d'emblée de correspondance entre le film et le livre.  Le film met avant tout l'accent sur le romanesque et la relation qui lie la baronne, délaissée par son mari dans une ferme de culture de café au Kenya, à son amant.

Quant au livre de K. Blixen, il témoigne avant tout de son amour pour l'Afrique. Et elle en parle divinement bien.  Moi qui suis plutôt une amoureuse de la brume, des forêts ténébreuses, de la lande et des clair-obscur du ciel se reflétant sur les lochs, elle est parvenue à me murmurer à l'oreille avec poésie et délicatesse son Afrique à elle.  Le vocabulaire usité est lié à son époque et sa culture, aussi utilise-t-elle parfois des termes qui nous paraissent inconvenants aujourd'hui. Mais que de respect et d'amour derrière ses mots ! Elle est arrivée à toucher du doigt l'essence et la magie africaine et, pour notre plus grand bonheur, à nous les transmettre avec grâce et générosité.

Extraits :

Quand le souffle passait en sifflant au-dessus de ma tête, c'était le vent dans les grands arbres de la forêt, et non la pluie. Quand il rasait le sol, c'était le vent dans les buissons et les hautes herbes, mais ce n'était pas la pluie. Quand il bruissait et chuintait à hauteur d'homme c'était le vent dans les champs de maïs. Il possédait si bien les sonorités de la pluie que l'on se faisait abuser sans cesse, cependant, on l'écoutait avec un plaisir certain, comme si un spectacle tant attendu apparaissait enfin sur la scène. Et ce n'était toujours pas la pluie. Mais lorsque la terre répondait à l'unisson d'un rugissement profond, luxuriant et croissant, lorsque le monde entier chantait autour de moi dans toutes les directions, au-dessus et au-dessous de moi, alors c'était bien la pluie. C'était comme de retrouver la mer après en avoir été longtemps privé, comme l'étreinte d'un amant.

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Au cours de mes safaris j'ai vu un troupeau de buffles de cent vingt-deux bêtes surgir du brouillard matinal sur un horizon cuivré comme si ces bêtes massives et grises, aux cornes horizontales et compliquées, étaient sorties du néant dans le but désintéressé d'enchanter mes yeux. J'ai vu toute une troupe d'éléphants en marche dans la forêt vierge, une forêt si épaisse, qu'il ne filtrait que des éclaboussures de lumière.

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La découverte de l'âme noire fut pour moi un évènement, quelque chose comme la découverte de l'Amérique pour Christophe Colomb, tout l'horizon de ma vie s'en est trouvé élargi.


11 commentaires:

  1. Un très bon livre que j'ai lu bien après Out of Africa.

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    1. Moi de même, et si j'ai été déboussolée au début de ma lecture, faisant trop référence au film malgré moi, et bien ce roman est arrivé à me séduire et finalement, je le préfère encore au film.

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  2. Ca me tente bien, j'ai gardé peu de souvenirs d'Out of Africa (hormis cette scène d'une sensualité dingue, où Robert Redford lave les cheveux de Meryl Streep.... à quoi tient le cinéma, passé au crible de notre étrange mémoire !!).
    Rien à voir mais après une tentative pour lire Le chagrin des belges, noté par ici, je dois abandonner pour l'instant. Je trouve très difficile d'y entrer, l'absence de frontière entre souvenirs, fantasmes et réalité me perd complètement...

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    1. Le livre est très différent, car il aborde essentiellement son amour... pour l'Afrique. Et j'ai adoré ça. Mais j'ai mis un petit temps à faire le deuil du film avant de pouvoir me délecter du livre.

      Le chagrin des belges est vraiment un grand roman belge, mais pas si facile d'accès. D'autant plus quand on est français ! La réalité est parfois si burlesque dans ce petit pays qu'il faut y être né pour distinguer ce qui est réel ou pas. Disons qu'on a certainement des repères que vous n'avez pas, ce qui accentue la difficulté de lecture. Ceci dit, venant d'une lectrice telle que toi, c'est tout de même étonnant et me fait réfléchir. Ce n'est donc certainement pas un roman à conseiller aux personnes qui lisent peu, car trop foisonnant. Mais je ne te peux que t'encourager à poursuivre, c'est vraiment un excellent roman. Peut-être quand tu auras plus de temps devant toi ?

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    2. Oui, je ne déclare pas encore forfait, je ferai une autre tentative à un moment plus propice...

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  3. C'est vrai que ce livre témoigne du grand respect de Karen Blixen pour l'Afrique est ses habitants mais il ne m'a pas vraiment touchée, peut-être à cause de l'écriture. J'ai nettement préféré le film et son côté romanesque.

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    1. L'écriture est très belle je trouve, je pense plutôt que tu étais trop attachée au film, or ils sont très différents. Et on ne s'y attend pas en plus, bref j'ai eu du mal au début mais finalement, j'ai pu me détacher du film. Les deux se complètent bien finalement.

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  4. Excellent souvenir de lecture.
    J'ai longtemps été perplexe à l'évocation de l'Afrique. mais une fois qu'on goûte à sa lumière si particulière, on y revient !

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    1. Voilà qui est bien dit ! Très bon dimanche, Mimi.

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  5. Comment ça des mots inconvenants ?

    Quelle vie elle a eue. Et le film, je ne m'en lasse pas même s'il se concentre sur ses amours malheureuses.

    Et ces mots : I had a farm in Africa, résonnent toujours avec émotion dans ma tête.

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    1. Oh, des mots qu'on n'utilise plus aujourd'hui car on les trouverait choquant, à replacer dans le contexte de son époque.

      A choisir, je relirai plutôt le livre, tant je me suis sentie au plus proche de Karen Blixen qu'il était possible.

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