lundi 7 mars 2016

Marguerite de Xavier Giannoli

Synopsis :

Le Paris des années 20. Marguerite Dumont est une femme fortunée passionnée de musique et d’opéra. Depuis des années, elle chante régulièrement devant son cercle d’habitués. Mais Marguerite chante tragiquement faux et personne ne lui a jamais dit la vérité. Son mari et ses proches l’ont toujours entretenue dans ses illusions. Tout se complique le jour où elle se met en tête de se produire devant un vrai public, à l’Opéra. Une histoire librement inspirée de la soprano américaine Florence Foster Jenkins, devenue célèbre grâce à son chant "très peu académique" dans les années 1920-1940.

Le moins que l’on puisse dire est que j’ai pris mon temps avant de voir ce film, tout simplement parce que j’avais quelques craintes à son sujet. Et bien j’ai eu grand tort de ne pas faire confiance au réalisateur Xavier Giannoli, qui a le grand mérite d’avoir évité tous les chausse-trappes possibles et imaginables que son sujet pouvait laisser entrevoir. Ne cédant jamais à la facilité, il amène ce qui aurait pu devenir une farce à quelque chose qui nous renvoie plutôt à la tragédie intime, en ne recourant ni à la caricature d’un milieu social donné, ni à la moquerie de son personnage principal. Car Marguerite, aussi installée qu’elle soit dans le déni, la folie douce de sa passion ou sa demande éperdue d’amour, ne peut qu’engendrer de la compassion et de la sympathie chez le spectateur.

Une femme vulnérable qui se retrouve comme au bord du précipice et que son entourage – par intérêt, lâcheté, indifférence, pitié et autres renoncements – encourage à s'y engager plus surement. J’ai trouvé ce film d’une très grande richesse mais aussi d’une très belle finesse. J’ai également apprécié le fait que mon regard sur quelques-uns des personnages secondaires n’a cessé d’évoluer pendant ma vision du film, et ce jusqu’aux toutes dernières séquences, qui sont glaçantes au possible. Il est difficile d’en dire plus sans dévoiler l’intrigue, mais sachez qu’il y a un autre processus créatif qui se déroule en coulisse, qui n'a guère suivi le chemin emprunté par Marguerite, à savoir la lumière, le don de soi, la générosité et le partage, mais empruntant plus volontiers le chemin de l'obscurité, de l'imposture et de la manipulation. Et si à l'instar de l'argent, l'art n'avait pas d'odeur ? Question intéressante et pertinente que soulève mine de rien Xavier Giannoli.

Le film Marguerite est vraiment du bel ouvrage, aussi bien au niveau visuel que narratif.

Marguerite de Xavier Giannoli a remporté les César du Meilleur son, des Meilleurs décors, des Meilleurs costumes et de la Meilleure Actrice pour Catherine Frot, qui est tout simplement impériale dans ce film. 


Réalisateur : Xavier Giannoli
Acteurs : Catherine Frot, Michel Fau, André Marcon
Origine : France
Année de production : 2014
Date de sortie en Belgique : 16/09/2015
Durée : 2h07



8 commentaires:

  1. J'ai la fâcheuse impression d'être largement passé à côté du film. L'interprétation de Catherine Frot est excellente, mais je n'ai pas vraiment apprécié tout ce qui gravite autour.

    Cela dit, c'est peut-être aussi parce que je m'attendais à autre chose. Peut-être pas à une comédie, mais à une histoire moins "plombante". Je suis ressorti de la salle avec l'impression de n'avoir vu qu'une pauvre femme victime d'une très large bande d'hypocrites...

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    1. Je crois effectivement que mes attentes étaient différentes, et mes craintes également. C'est curieux dans la mesure où j'ai vu plus volontiers de la lâcheté dans son entourage que de l'hypocrisie. J'ai même essayé de comprendre les raisons de chacun, mais lorsqu'elle se retrouve sur scène entourée du public, comme une pauvre gazelle dans une arène romaine qui va se faire massacrer , et bien je leur en ai voulu énormément, avec cette envie de les condamner pour non-assistance à personne en danger.

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  2. Anonyme3/08/2016

    Bonjour Sentinelle, tout à fait, un très beau film, riche de personnages bien écrits et de thèmes passionnants, où l'artiste n'est pas celui que l'on croit au début (pour le film, c'est la même chose : il n'est pas celui que l'on croit avant de l'avoir vu). C'est en même temps intelligent et émouvant.

    Strum

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    1. Bonjour Strum,

      *** Attention spoiler ***

      J'ai trouvé que ce majordome avait vraiment des allures de Méphistophélès, particulièrement dans les dernières scènes. Quel affreux manipulateur. Alors oui, le grand artiste de ce film, c'est lui. Mais à quel prix ? Pour terminer sa série et finir sur le bon cliché, il va jusqu'à anéantir sa muse. Quelle monstruosité ! Et pourtant oui, c'est bien lui l'artiste. Tu sais, cette séquence m'a fait penser au photographe Kevin Carter, avec son très célèbre cliché « La fillette et le vautour », qui lui a valu en 1994 un prix Pulitzer mais aussi...un suicide. Il faut avoir le diable en soi pour assumer un truc pareil et ne pas éprouver de la culpabilité qui s'en suit.

      Enfin bref, quelle fin subtile et intelligente, bravo Monsieur Xavier Giannoli !

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  3. Anonyme3/08/2016

    Moi, ce majordome m'a fait penser à celui de Sunset Boulevard de Billy Wilder, comme je le dis dans ma critique "chez moi". La fin du film est remarquable en effet.

    Strum

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    1. Ah mais oui, j'avais oublié que tu en faisais référence dans ta chronique, je ne m'en souvenais plus dans la mesure où je n'ai jamais vu ce film dans son entièreté (je veux dire par là j'ai essayé de le voir mais j'ai vraiment un blocage avec Sunset Boulevard de Billy Wilder, plus particulièrement avec le jeu de l'actrice Gloria Swanson, qui m'irrite beaucoup).

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  4. Anonyme3/08/2016

    C'est vrai que Swanson peut être agaçante dans Sunset Boulevard. Je t'invite quand même à voir le film jusqu'au bout. Wilder est tellement génial (je suis un grand fan de Wilder).

    Strum

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    1. Je vais essayer Sturm. Mais je ne suis pas un modèle de concentration, mes pensées se faisant volontiers la malle, et ce particulièrement devant mon petit écran. Alors un film qui ne me plait pas... En cela, le cinéma est une aide pricieuse :)

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