« J’ai quinze ans, je m’appelle Fatemeh, mais je n’aime pas mon prénom. Dans notre quartier, tout le monde avait un surnom, le mien était ‘la nièce de la muette’. La muette était ma tante paternelle. Je vais être pendue bientôt […]
J’ai supplié le jeune gardien de la prison pour qu’il m’apporte un cahier et un stylo, il a eu pitié de moi et exaucé le dernier souhait d’une condamnée. Je ne sais par où commencer. »
Ce court roman, qui se lit d’une traite, se présente sous la forme d’un journal d’une condamnée. Ce témoignage est sans aucun doute une fiction mais nous pressentons bien que cette histoire-là, aussi romancée soit-elle, n’est que le reflet de ce que vivent certaines femmes au pays des mollahs de l’Iran d’aujourd’hui : racontars, cupidité, sottises, dénonciations, domination masculine, oppressions, condamnations arbitraires, exécutions capitales, voilà toute la panoplie malheureusement bien connue de l’autoritarisme et du totalitarisme.
Sans fioriture aucune, avec les mots simples d’une jeune fille de 15 ans attendant son exécution par pendaison pour ne pas avoir accepté d’être soumise à la loi du plus fort, l’auteur va à l’essentiel et frappe juste là où il faut pour s’immiscer dans notre mémoire en y laissant des traces tenaces. Lorsque dignité et liberté conduisent à la mort acceptée, voilà le prix à payer par celles qui résistent.
Chahdortt Djavann est une jeune auteure iranienne installée en France après avoir fui la dictature de son pays instaurée par les mollahs de Khomeyni en 1993. Anthropologue de formation, elle ne pratique pas la langue de bois et n’hésite pas à se placer au cœur des problèmes politiques actuels, comme en témoignent les essais tels que À mon corps défendant, l’Occident ou encore Bas les voiles ! .
La muette m’a fait penser à La servante écarlate de Margaret Atwood, qui dénonce également le fondamentalisme par l’entremise d’un très bon roman d’anticipation.
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