samedi 18 août 2018

Moisson de vieux films (3)

De Mayerling à Sarajevo (1940) de Max Ophuls ***
Avec Edwige Feuillère, John Lodge, Aime Clariond

Le destin tragique de l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche,  devenu l'héritier de François-Joseph Ier à la mort de son fils l'archiduc Rodolphe. 

Un film qui mélange assez adroitement la romance entre l'héritier et la comtesse tchèque (et donc sans rang dynastique) Sophie Chotek et les aspects historiques plus politiques tels que les changements de gouvernance qu'auraient pu apporter l'archiduc François-Ferdinand, aux idées plus modernes que son oncle François-Joseph, souverain despotique qui mènera à la première guerre mondiale. 

J'imagine volontiers l'importance symbolique qu'aurait pu avoir ce film pour Max Ophuls, dans la mesure où nous sommes à la veille de la seconde guerre mondiale au début du tournage. Mais la grande histoire rattrapera la petite histoire, et le tournage sera interrompu suite à la mobilisation française de 1939, pour n'être repris qu'en février 1940,  avec une équipe réduite.  La qualité du film s'en ressent, notamment dans les dernières scènes du film, dont la pauvre reconstitution d'une scène clé, celle  de l’assassinat du couple lors de l'attentat à Sarajevo. Ce film n'est donc pas une oeuvre phare de sa filmographie mais il se regarde tout de même avec plaisir et intérêt. Mention spéciale pour l'actrice Edwige Feuillère, aussi belle que talentueuse. 

Et si vous avez toujours voulu savoir ce que signifie un mariage morganatique sans oser poser la question, le film y répondra et vous pourrez ensuite briller en société en le mentionnant nonchalamment au cours d'une conversation portant sur la monarchie (sujet pas très en vogue, il est vrai, mais qui vous distinguera d'autant plus).



Ce n'est pas le premier film de Max Ophuls que je chronique sur mon blog.  Je vous renvoie aux billets correspondants : Le plaisir (moyennement aimé) et Madame de... (beaucoup aimé)



Copie conforme (1947) de Jean Dréville ****
Avec Louis Jouvet, Suzy Delair, Annette Poivre 

Que ce film est drôle, savoureux dans ses dialogues et réjouissant à regarder, grâce à  l'excellent jeu des acteurs principaux,  à savoir Suzy Delair et Louis Jouvet, qui s'en donne à cœur joie dans cette double interprétation d'un modeste employé et d'un audacieux cambrioleur, qui se ressemblent tellement que le voleur à l'idée de l'utiliser comme alibi pour ses prochaines combines. Franchement, son interprétation est un régal pour les yeux, tant il arrive à donner une personnalité tout autre en fonction de son personnage, du grand art. 

Ce film n'a pas d'autre prétention que celle de vous divertir et le réussit fort bien. Les dialogues sont de Henri Jeanson,  l'auteur du "Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une tête d’atmosphère ?" d’Arletty dans Hôtel du Nord de Marcel Carné, ou encore de Pépé le Moko de Julien Duvivier, pour ne citer que ceux-là. Le scénariste français d'origine russe n'est autre que Jacques Companeez (La Maison du Maltais de Pierre Chenal, J'étais une aventurière de Raymond Bernard, Casque d'or de Jacques Becker).



Ce n'est pas la première fois que je commente un film de Jean Dréville, puisque je vous ai déjà présenté Le joueur d'échecs.  Vu à l'époque à la Cinematek de Bruxelles et dont je me souviens encore très bien, ce qui est bon signe. Les Nuits blanches de Saint-Pétersbourg est nettement plus dispensable.




Maigret et l'affaire Saint-Fiacre (1959) de Jean Delannoy  ***
Avec Jean Gabin, Michel Auclair, Robert Hirsch, Valentine Tessier

Le commissaire Maigret retourne dans sa ville natale car sa vieille amie, la comtesse de Saint-Fiacre, reçoit une lettre anonyme lui annonçant qu'elle mourra le merdredi des Cendres... Le jour venu, elle est retrouvée morte. On diagnostique un arrêt cardiaque, mais cette version des faits ne suffit pas à Maigret.

Adapté de L'Affaire Saint Fiacre de Georges Simenon (j'en parle ici), ce film respecte le roman dans ses grandes lignes, tout en s'en différenciant par certains aspects, notamment en ce qui concerne l'attitude de Maigret. Dans le roman, le commissaire se complait dans ses souvenirs d'enfance en se laissant volontiers porter par les événements. Dans le film, Jean Gabin a toujours cette lueur mélancolique dans les yeux mais dirige plus en main de maître l'enquête en cours.  C'est par ailleurs une constante dans l'adaptation des romans de Simenon avec Jean Gabin comme interprète principal, les personnages simoniens interprétés par l'acteur sont souvent plus terre à terre, plus bavards et plus interventionnistes que les personnages littéraires, davantage contemplatifs et doués d'une capacité d'absorption semi-consciente de l'environnement, plus intuitifs et vulnérables en quelque sorte.   Quoi qu'il en soit, c'est un plaisir de l'accompagner sur les lieux de son enfance et de revoir la Place d'Allier et la reconstitution en studio du Grand Café de l'époque,  à Moulins en Auvergne.  Un Grand Café dans lequel j'ai eu le plaisir de me rendre à plusieurs reprises.  Pour le coup, la nostalgie joue pour moi également.

La mise en scène est classique mais efficace, l'interprétation des acteurs honnêtes et l'ambiance provinciale et l'utilisation du château assez intéressantes. A noter, les dialogues sont de Michel Audiard.  Un bon Maigret, en somme.




Une autre adaptation de Maigret au cinéma ?  Les inconnus dans la maison de Henri Decoin, avec Raimu.
Une autre adaptation de Simenon, avec Jean Gabin ?  Le président de Henri Verneuil.

6 commentaires:

  1. Bonjour. Tu sais que j'aime beaucoup ta moisson de vieux films. Je viens de voir Copie conforme, pas désagréable. J'ai vu De Mayerling à Sarajevo que j'aime bien mais qui n''est pas parmi les meilleurs Ophuls. Quant à Maigret et l'affaire Saint Fiacre ce n'est déjà plus tout à fait pour moi un vieux film (question de génération). C'est un cas particulier pour moi. Hyperclassique, moins riche que le roman comme tu l'as très bien écrit. Mais je le revois à la TV chaque fois qu'il est rediffusé, c'est à dire très souvent, avec sa galerie de seconds rôles très typés. C'est ainsi le film que j'ai le plus vu. Environ 15 fois. J'en connais des scènes entières par coeur. A bientôt.

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    1. Bonjour Eeugab,

      C'est toujours un plaisir de te retrouver par ici :)
      Je dois t'avouer que j'avais hésité d'ajouter "Maigret et l'affaire Saint Fiacre" dans ma moisson de vieux films, mais il a un petit côté désuet, du coup, je l'ai ajouté quand même. Je n'en reviens pas que tu l'aies vu aussi souvent. A bientôt !

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  2. Comme Claude, je suis fan de cette moisson patrimoniale !
    Un Ophuls (que je n'ai pas vu hélas), donc forcément recommandable à mes yeux, un Dréville (que j'ai en stock, je n'ai plus qu'à m'y mettre) réunissant Jouvet et Delair, comme dans "Quai des Orfèvres", et ce Maigret mitonné façon Delannoy/Gabin/Audiard (trio du "Baron de l'écluse") que j'ai également en affection.

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    1. Merci Princécranoir :)

      Le Dréville et le Delannoy, je les ai aussi vus à la télé. Le Ophuls fait partie des DVD du coffret II, Gaumont - 120 ans. Il me reste encore pas mal de films à voir du coffret, du plaisir en perspective !

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  3. Je n'ai vu aucun de ces films. Le Dréville m'intéresse particulièrement.

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    1. Il est passé dernièrement à la télé, j'espère que tu as eu le réflexe de l'enregistrer ;-)

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