Nous sommes en 1905. En pleine guerre contre le Japon, la flotte russe vient d'essuyer une cinglante défaite à Tsushima. Alors que le Transsibérien est la cible d'un attentat, c'est tout le ravitaillement en armes des troupes du tsar en Extrême-Orient qui est compromis. L'affaire est confiée à Eraste Pétrovitch Fandorine, qui sans le savoir, va enquêter sur un personnage qui est en lien avec son propre passé.
Et nous voilà plongés quelques décennies plus tôt au pays du soleil levant, en 1878 plus exactement. L'ère Meiji bat son plein, mettant fin à la politique isolationniste du Japon des siècles précédents (lire à ce sujet l'excellent roman Les mille automnes de Jacob de Zoet par David Mitchell, j'en parle ici) et marquant le début de la politique de modernisation du pays, ce qui attire bien évidemment la convoitise des occidentaux.
Boris Akounine met toute sa connaissance de l'histoire japonaise au service de ce récit foisonnant bourré de péripéties et d'aventures, d'intrigues et de machinations politiques, dans lequel la vengeance, la manipulation, la trahison mais aussi l'amour et le sens de l'honneur impulsent un tempo soutenu tout au long de ce (très gros) roman. Et si l'ère Meiji signe aussi la fin des samouraïs, cela ne les empêche aucunement de se retrouver, d'une manière ou d'une autre, dans cette société encore extrêmement codifiée, même si la part belle est donnée aux shinobis (plus communément appelés les ninjas ou les furtifs, censés ne plus exister depuis plusieurs siècles, mais c'est mal les connaître) et à leur science (le ninjutsu). Que cela ne tienne, les yakuzas ne sont pas en reste et les femmes fatales non plus, c'est le moment ou jamais de vous initier au Ninsou ou au Joujutsu (l'art de l'amour ou la technique de l'attrape-nigaud, c'est selon).
Désires-tu vraiment
Que de tes yeux un beau jour
Tombent les écailles ?
Vous l'aurez compris, ce roman d'aventures ne se prend pas non plus trop au sérieux, et son ambition première est surtout de vous divertir, non sans humour. C'est instructif, trépidant, passionnant, amusant, de quoi passer un agréable moment de lecture. Mission totalement réussie.
Quelques mots sur l'auteur. Grigori Chalvovitch Tchkhartichvili, alias Boris Akounine, est un écrivain russe né en Géorgie. Auteur de nombreuses traductions de l'anglais et du japonais, spécialiste de l'histoire japonaise, il est surtout célèbre pour ses romans policiers historiques de la série « Eraste Pétrovitch Fandorine », composée d'une petite quinzaine de tomes, que l'on peut lire indépendamment les uns des autres (même si c'est toujours mieux de les lire dans l'ordre, ce que je ne fais pas, bien évidemment). Traduit en dix-huit langues, il est - parait-il - le plus grand auteur de best-sellers en langue russe, excusez du peu. Il faut dire, il n'a pas son pareil pour mettre en scène les grands épisodes de l'histoire russe de cette époque, ce qui doit flatter son lectorat, dont je fais partie. Fin connaisseur du Japon, il met en scène assez rapidement Massa, le fidèle serviteur que Fandorine a ramené du Japon. Il vous faudra d'ailleurs attendre plusieurs tomes pour connaître les circonstances de leur rencontre et il se trouve que c'est justement dans L'attrapeur de libellules que tout vous sera dévoilé (c'est ce qu'on appelle la cerise sur le gâteau). Déjà cinq tomes au compteur (celui-ci est particulièrement réussi), et je ne m'en lasse toujours pas. Vivement le prochain ! Et ce sera La maîtresse de la mort...
L'attrapeur de libellules de Boris Akounine, Editions 10 X 18, Collection Poche Grands Détectives, 17 octobre 2013, 888 pages
Bonjour. Il y a bien longtemps que je n'ai lu les Grands détectives. J'ai surtout lu Edward Marston, Ellis Peters, Marc Paillet, Lilian Jackson Braun, Stuart Kaminsky, Ake Edwardson. En général au bout de trois ou quatre j'en ai un peu assez. Bonne journée à toi.
RépondreSupprimerBonjour Eeguab,
SupprimerTu en as lu bien plus que moi ! Concernant Ellis Peters, je n'ai vu que son adaptation, à savoir la série Frère Cadfael, que j'avais bien aimée (le Moyen Âge, l'abbaye de Shrewsbury, la guerre civile). L'acteur Derek Jacobi est par ailleurs excellent, c'est un plaisir de le voir interpréter ce rôle.
Sinon, j'ai commencé la série Eraste Pétrovitch Fandorine il y a certainement plus de dix ans. Pour te dire que je ne me presse pas non plus, même si j'en ai lu trois sur quelques mois (une petite accélération dans le temps, donc). Et je crois que le prochain sera pour bientôt (enfin, dans quelques mois tout de même).
Très bonne journée à toi également !
J'adore cette série ! La fin de celui-ci est tragique. Pauvre Eraste Petrovitch !
RépondreSupprimerEffectivement. Une fin tragique mais un excellent tome de la série.
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